Souvenir du sixième de mars 2013,
Le Coin de Table de Henri Fantin-Latour, 1872
Paul Verlaine et Arthur Rimbaud, en bas et à gauche du tableau,
Musée d’ORSAY, Paris.
Mars 2013
Boulevard Saint-Germain, Paris
Exposition PAUL VERLAINE
Fiasque saturnienne*,
L’élixir de la mort « opiume » la nuit noire,
Et j’offre ma carcasse à ce doux exutoire,
Tandis que du flacon coule un filtre maudit
Qui embue ma douleur, et vague mon esprit.
« Fée verte** », qu’était douce sa liqueur ambroisie,
ô « Bleue** » j’aimais ses « reins, beaux »*** comme poésie,
Quand il m’offrait son corps jusqu’au dernier vomir,
Que coulait le nectar de nos mots et délires.
« Brouille**** », que son osmose était miroitement
Quand elle nous « ondait » en son embrasement.
Et que l’heure perlée était belle et fragile,
Cadençant chaque ciel de notre vie asile.
Le temps nous a ôté nos instants de jeunesse,
Et je fais le procès pour vol de notre liesse :
Désormais décharné et la couenne pourrie,
Déchiquetée, festin de la plus vile harpie.
L’élixir de la mort « opiume » ma nuit noire,
Et j’offre ma carcasse à ce doux exutoire.
Demain ne Nous sera, mais au fond de mes verres,
Se noient mes derniers vers, arrachés à ses serres.
Adieu ma pauvre vie.
J’ai tué mon ami.
Propos prêtés à Paul Verlaine.
* « Poèmes saturniens » est le titre du premier recueil de poèmes de Paul Verlaine,
publié en 1866 chez l'éditeur Alphonse Lamer.
** Autres noms donnés à l’absinthe.
*** Comprendre Rimbaud
**** Brouille : accessoire pour préparer l’absinthe et faire s’exhaler
les parfums des herbes grâce à l’eau.